What If : Retomber en enfance

Mes yeux défirent leurs voiles de ténèbres. Une répétition à cette routine matinale, la première prise de conscience journalière, l'abrutissement du réveil vaseux. J'ourlai les couvertures de mon plumard pour m'orienter vers mon ordinaire toilette, un geste qui en suffisait à gommer l'émergence engourdie de mes paupières. Je plantai la tête dans ce vasque d'eau fraîche, frissonnant de l'électrique collision glacée lorsque mon visage s'ébranla devant le miroir de la coiffeuse que m'avait cédé Morgane, au même titre que cette chambre feutrée.

C'était bien mes traits qui se réverbéraient sur la surface réfléchissante du mobilier. Mes lèvres gonflées. Mes iris d'un éclat de malachite. Ma chevelure fauve. Mon visage était ma possession, en démontrait la sensation du toucher palpable que j'effleurais de l'extrémité de mes phalanges... A quelques détails qui auraient du m'interpeller en amont, lorsque je dûe me hisser sur la pointe de mes orteils pour atteindre le récipient humide.

Ce faciès, je le connaissais pour l'avoir vu, il y a de cela quelques décades. Cette face... était celle de mes jeunes années, lorsque j'avançais vers le dixième an de mon enfance.

Une voix aiguë et plaintive échappa de mes cordes vocales, elles aussi métamorphosées. Humiliant davantage ma grêle carrure de poupon faiblard.

« Merde. Merde. Merde. Ce ne peut pas être possible. » Les injures paraissaient presque insolites dans cette bouche juvénile. Si décalées.

La stupeur me fit sortir dehors, jetée dans mes loques trop grandes me formant un ersatz de tunique. Je déboulai dans les rues parisiennes avec une moue pétrie de colère... Qui était injustement attendrissante sur mes nouveaux traits.

C'est d'un timbre tout aussi enfantin que je lançai ma plainte sur l'asphalte, les passants se penchant avec curiosité sur ma petite taille — un mètre trente tout au plus.

« Que m'arrive-t-il ? »

Indications: